Mon Père ...
Je me souviens d'un maire d'une petite ville d'Ile de France qui avait pour habitude de commencer tous ses discours par une phrase redondante : "Fils et petit-fils de mineur ..."
Cette petite phrase, je pourrais la faire mienne... mon Père "travaillait à la mine" lorsqu'il fut appelé sous les drapeaux. Avant lui, son père et le père de son père avaient servi cette "bouffeuse d'hommes"...
Leurs corons n'étaient pas au Nord. Si l'on excepte cette différence géographique, la chanson de Pierre Bachelet est l'exact reflet de ce que mon Père nous racontait et que nous avons pu connaître lors de vacances chez nos grands-parents.
Toutes ces générations logées (!) tant bien que mal et plutôt mal que bien dans de grands bâtiments austères, sans le moindre confort, avec pour tout point de vue le terril ... Une mort programmée, lente et douloureuse, les poumons rongés par la silicose ... quand on avait la chance d'échapper au coup de grisou !
Doit-on se réjouir de la fermeture des mines ? Mon Père n'est plus là pour me répondre mais, même s'il évoquait avec nostalgie cette camaraderie entre gueules noires , il n'a jamais regretté d'avoir passé peu d'années au fond ...
Son rêve à lui, c'était l'ébénisterie. Embauché dans un atelier de menuiserie dès son arrivée dans la Capitale, il n'a eu de cesse de vouloir "progresser". Me reviennent en mémoire, ces cours du soir qu'il suivait assidument : "Dessin industriel"...
Pouvez-vous imaginer un instant tout ce que cela représentait pour des enfants ? Mon Père allait à l'école et la petite fille que j'étais, tout en étant admirative des beaux dessins (?) et de la calligraphie qui les accompagnait, restait dubitative quant à l'utilité de la chose !
Mon amour de la chine me vient aussi de Lui. Tant de dimanches passés, accroupis devant les étals des brocanteurs à traquer L'objet, insolite, drôle, utile ou inutile... Puis, ma constance enfin récompensée par un cornet de marrons grillés ou un paquet de cacahuètes !!!
Une simple photo de classe que je ne connaissais pas "1936, classe de Mademoiselle Lafougère", un petit garçon souriant ... C'était mon Père. Avec ses camarades, tous enfants de mineurs ...
Il souriait toujours mon Père, il aimait chanter, il aimait la Vie, les AUTRES et, même si le terme peut sembler galvaudé, je m'y risque car il n'est que pure vérité : mon Père était un homme BON ...